LIAISONS DOUCES ou ... COMMENT SE DEPLACER AUTREMENT
Avez vous remarqué le nombre croissant de personnes se déplaçant à pieds ou à vélo dans nos villes et villages ou entre ceux-ci ?
Mais au fait, de quoi parle-t-on ? Que recouvrent les liaisons douces ? Selon nous, il s’agit d’itinéraires mixtes pour piétons, avec ou sans poussettes, vélos et PMR (personnes à mobilité réduite), éventuellement roller selon le type de revêtement. Sur ces itinéraires mixtes, la priorité reste aux piétons et l’aménageur doit éviter d’installer des escaliers ou obstacles divers.
Ces liaisons permettent donc aux modes doux (non motorisés) de relier différents points de la ville ou de relier des villes ou des villages entre eux. Une rue piétonne est typiquement une liaison douce. Une « zone 30 », où les voitures circulent maximum à 30 km/h, est très complémentaire des liaisons douces, et parfois plus utile pour le développement du vélo notamment : le vélo s’y sent en sécurité.
Le cas des pistes ou bandes cyclables est encore un peu différent, car par définition réservées aux vélos.
Dans l’idéal, les liaisons douces devraient relier entre elles les différentes zone 30 de la ville, et à terme, il ne subsisterait que quelques rues avec prépondérance de trafic auto, qui n’auraient été requalifiées ni en zone 30, ni en liaison douce ! Rêvons un peu !
La FCDE ( Fédération pour les Circulations Douces en Essonne) lutte pour la sécurité des déplacements non motorisés ( à pied, en fauteuil roulant, à vélo, à rollers) et a édicté une charte très intéressante, dont voici quelques extraits. Voir le site http://www.circulationsdouces91.org/charte_fcde.html
RESPECTONS NOUS LES UNS LES AUTRES
1 Repenser le vélo et la marche comme moyen de déplacement
En France, la marche à pied et le vélo sont souvent considérés comme des activités de loisir en premier lieu. Les aménagements réalisés dans ce sens sont utiles et méritent d’être poursuivis et améliorés. Cependant, la marche à pied et le vélo sont avant tout des moyens de déplacements quotidiens, pour aller au travail, à l’école, faire les courses…
Depuis 30 ou 40 ans les aménagements urbains ont réduit les possibilités de déplacements à pied ou à vélo.
Nous demandons aux responsables politiques et aux aménageurs :
- d’intégrer systématiquement la place des piétons (y compris avec poussette et personnes en fauteuil roulant) et des cyclistes dans tous les projets de création et de réfection de voirie, comme le prévoit la Loi sur l’air, mais aussi dans les projets d’urbanisme (constructions d’habitation et d’équipements publics, aménagements de zones d’activités industrielles ou commerciales…)
- de promouvoir l’utilisation du vélo, de la marche à pied et des transports en commun pour réduire les excès de la circulation automobile conformément aux objectifs du PDU d’Ile de France.
2 Trois critères à respecter : continuité, maillage et intercommunalité
Les aménagements spécifiques réalisés ces dernières années sont souvent peu fréquentés parce que mal conçus, en particulier les pistes cyclables. Les principales erreurs en cause sont les discontinuités, le manque de connexions avec le reste du réseau et l’absence de coordination intercommunale. L’exemple type est la portion de piste cyclable dont on ne voit pas bien comment y accéder depuis la chaussée et qui se termine brutalement à la sortie de la commune à l’endroit où les voitures accélèrent.
Dans tous les projets d’aménagements spécifiques de liaisons douces, nous demandons aux responsables publics de veiller au respect des trois critères de base qui assureront leur sécurité et leur fréquentation :
- la continuité des aménagements, en particulier pour le franchissement des ouvrages d’art, qui requiert parfois des solutions imaginatives ;
- leur maillage constant avec le réseau de voirie existant ;
- la gestion intercommunale de ces projets.
3 La mixité des aménagements, et la redistribution de la voirie sont les clés de la réussite
Il serait illusoire et inutile de vouloir créer des réseaux spécifiques séparés pour les piétons, pour les cyclistes, pour les bus et pour les automobilistes. Le cas de la ville nouvelle d’Evry, véritable labyrinthe en 3 dimensions avec ses 4 réseaux (piétons, vélos, voitures et bus en site propre) peu ou pas interconnectés, est l’exemple type de ce qu’il ne faut pas faire pour développer l’usage du vélo ou de la marche à pied.
Le partage bien conçu de la voirie, dans le respect de la sécurité de chacun des usagers est la clé de la réussite. Les aménagements spécifiques de type véloroutes et voies vertes sont utiles, mais ne pourront pas atteindre une densité suffisante pour faire face aux besoins en termes de déplacements urbains et interurbains. L’Essonne possède déjà un réseau dense et de bonne qualité de voiries dont le seul défaut est d’avoir été aménagées en fonction des contraintes imposées par la circulation automobile.
Nous demandons aux responsables politiques et aux aménageurs de prévoir et d’organiser le partage de la voirie en retenant que la règle générale doit être la coexistence :
- des vélos et des automobiles sur la chaussée des routes et des rues ;
- des vélos et des bus sur les voies de bus en site propre ;
- des piétons, des poussettes et des fauteuils roulants sur les trottoirs ;
- de l’ensemble piétons, rollers(1) et vélos sur les voies mixtes(2)
remarque 1 En dehors des voies mixtes de type voies vertes goudronnées la place des rollers est plus difficile à définir dans des règles générales que celle des vélos ou des piétons, d’autant plus qu’elle n’est pas encore clairement régie par le code la route. Elle doit être réfléchie avec souplesse et en fonction de la vitesse de l’usager. Par exemple un roller rapide peut être gênant sur un trottoir mais acceptable au même titre qu’un vélo sur la chaussée de certaines rues en ville. D’une façon générale, les rollers nécessitent des voies larges et des revêtements de bonne qualité, ce qui convient bien aussi aux vélos, poussettes et fauteuils roulants. C’est pourquoi prévoir l’usage des rollers facilite l’ensemble des circulations douces.
remarque 2 On appelle ici "voies mixtes" les aménagements destinés à être fréquentés aussi bien par des piétons que par des vélos ou rollers. L’exemple type est la « voie verte » telle que définie par l’AF3V, c’est à dire un cheminement de 3 à 5 m, de large, en site propre, généralement destiné en priorité aux déplacement de loisirs, en zone naturelle ou d’espaces verts. Mais cela peut être également le « trottoir cyclable » en zone péri-urbaine, ou la « bande dérasée multifonctionnelle revêtue » (bas-côté goudronné) le long des routes en zone inter-urbaine.
4 Non aux pistes cyclables alibi ! La plupart des pistes cyclables existantes sont peu utilisées car peu utilisables, sauf par les piétons car elles occupent souvent la place d’un trottoir : pistes mal entretenues, d’un seul côté de la route, mal connectées au reste de la voirie avec peu d’entrées et de sorties, ou encombrées de voitures en stationnement ou soulevées par les racines d’arbres… Les cyclistes évitent de s’y faire piéger et restent sur la chaussée automobile malgré les fréquents panneaux indiquant le caractère obligatoire de la piste. Ce type d’aménagement et de signalisation ne sert que d’alibi pour les responsables publics afin d’échapper à leurs responsabilités et n’assure pas la sécurité des cyclistes. La réalisation de pistes cyclables utiles requiert des exigences techniques souvent difficiles à réunir. C’est pourquoi nous demandons aux responsables publics de n’envisager la solution de pistes cyclables en site propre (réservées aux seuls cyclistes depuis le décret du 14 septembre 1998) que lorsque les conditions nécessaires à leur bonne utilisation sont réunies : pistes unidirectionnelles de chaque côté de la route, présence d’un trottoir pour les piétons, entrées et sorties fréquentes, largueur suffisante pour permettre l’entretien…Lorsque cela n’est pas possible, pour des questions d’emprise en largeur en particulier, ou lorsque cela ne répond pas à la nécessité impérieuse de sécurité, il vaut mieux opter pour la « voie mixte » en site propre pour les piétons, rollers et cyclistes lents d’une part, et pour les bandes cyclables sur la chaussée principale pour les autres cyclistes, d’autre part. 5 Définir des axes structurants La définition d’axes structurants, c’est à dire d’itinéraires majeurs pour les liaisons douces sur un ensemble de communes, au niveau du département de l’Essonne, en connexion avec les départements voisins, est nécessaire pour organiser et structurer un réseau d’aménagements spécifiques, maillé et continu à moyen terme. Deux types d’axes doivent être privilégiés : - Les axes de déplacements quotidiens majeurs, qui sont déjà définis par les axes routiers principaux qui nécessitent l’aménagement de bandes cyclables, de pistes cyclables ou de voies mixtes selon les cas ; - Les axes indépendant des grands axes routiers, en général de type « voies vertes », adaptés en priorité aux loisirs. Entre ces axes structurants, le réseau de voirie départemental et communal existant permet d’irriguer l’ensemble du territoire et ne nécessite généralement que des aménagements légers, de type « bande dérasée multifonctionnelle » pour les routes les plus passantes, pour assurer la sécurité des cyclistes. 6 Organiser la coordination entre services techniques et la formation de leurs agentsCertains aménagements intéressants dans leur principe sont peu utilisés à cause de défauts techniques considérés comme de détail au moment de leur réalisation. En effet, les agents des services techniques des collectivités territoriales ont rarement bénéficié de formation spécifique sur les liaisons douces, et ne sont souvent pas eux-mêmes utilisateurs de ces modes de déplacement au quotidien. De même, certaines incohérences d’aménagement s’expliquent par le manque de coordination des différents services territoriaux concernés. Nous demandons aux responsables politiques et aux aménageurs de coordonner leurs efforts et de dépasser les clivages administratifs et territoriaux de compétence pour assurer la cohérence des équipements.. Nous leur demandons de veiller à ce que les agents des services techniques de la voirie, de l’environnement et des aménagements urbains bénéficient d’une formation théorique et pratique sur les spécificités des aménagements et de la sécurité des déplacements non motorisés. 7 Prévoir et assurer au quotidien l’entretien des aménagements Même les aménagements de liaisons douces les mieux conçus sont parfois inutilisés faute d’entretien. Une piste mal entretenue est une piste inexistante : des éclats de verre ou de cailloux sur une bande ou une piste cyclable font se rabattre aussitôt les cyclistes sur la chaussée automobile, souvent bien mieux entretenue. Pour leur part les piétons, à plus forte raison les personnes en fauteuil roulant ou avec poussette, évitent les cheminements défoncés, boueux ou encombrés d’obstacles, et se retrouvent sur la chaussée plus confortable. Nous demandons aux responsables politiques et aux aménageurs de définir et de faire connaître, dès la conception d’un aménagement : - la structure qui sera chargée de l’entretien ; - l’origine des moyens financiers correspondants ; et de s’assurer que cette responsabilité quotidienne d’entretien a bien été intégrée par les différentes personnes du service concerné. 8 Adapter les règlements de circulation En dehors des aménagements spécifiques, beaucoup de problèmes de circulation et de sécurité pour les piétons et les vélos dépendent du respect des règlements de circulation routière dont sont chargés en particulier la police et le maire. Nous demandons à la police et aux maires, d’une part, d’établir et de faire appliquer des règlements clairs : - pour limiter la vitesse des automobiles (et éventuellement des cyclistes sur les voies mixtes) ; - pour interdire le stationnement des voitures et camions sur les trottoirs et pistes cyclables, ainsi que les déjections canines ; - pour éviter l’encombrement des trottoirs par du mobilier urbain, des bacs de collecte de verre ou de papier, des panneaux publicitaires ou de signalisation ; - pour délimiter des lieux et horaires de dépôt des poubelles, afin de préserver la continuité des trottoirs et voies mixtes à toute heure, d’autre part, d’adapter les règlements de circulation pour faciliter les déplacements à pied ou à vélo, en particulier en définissant plus fréquemment : - des zones 30 dans les rues étroites et fréquentées ; - des « contresens cyclables » (mise à double sens pour les vélos des rues à sens unique) - la circulation des vélos dans les voies réservées aux bus ; - des « tourne-à-droite » autorisés pour les cyclistes à certains feux rouges ; - des priorités en faveur des piétons et des cyclistes aux intersections chaque fois que possible. Des emplacements vélos et poussettes dans les immeubles d’habitation et lieux publics La présence de locaux spécifiques, protégés et de taille suffisante pour les vélos et poussettes dans les immeubles d’habitation, d’une part, et de parcs à vélos à proximité des entrées de lieux publics, d’autre part, est importante pour favoriser les circulations douces. En plus de parcs à vélos dans les lieux publics, nous demandons que des garages à vélos et à poussettes soient prévus dans les projets publics ou privés d’urbanisme, et favorisés par des incitations fiscales dans les travaux de rénovation de constructions anciennes. 09 Favoriser l’intermodalité avec les transports en commun La possibilité de passer facilement d’un mode de déplacement individuel à un transport en commun est déterminante pour accroître l’usage du vélo ou de la marche à pied pour les déplacements quotidiens. En Essonne, la combinaison vélo + train par exemple est souvent la solution optimale pour les allers-retours vers Paris, ou de banlieue à banlieue. Des aménagements spécifiques, en concertation avec les responsables des sociétés de transport et la SNCF, doivent être généralisés pour faciliter l’accès aux transports en commun pour les cyclistes, poussettes et personnes en fauteuil ou à mobilité réduite, en particulier : - les plans inclinés ou ascenseurs pour l’accès aux différents quais des gares, - les plates-formes surbaissées dans les bus, - les parcs à vélos bien situés, abrités et/ou gardés à l’entrée des gares, - l’équipement des gares en consignes à vélos. Sur certaines lignes de bus, l’instauration d’une possibilité d’arrêts à la demande faciliterait également le recours aux transports en commun Le cas particulier de l’aéroport d’Orly, situé en zone très urbanisée, demande un réaménagement spécifique, tant les conditions d’accès autres qu’en voiture sont difficiles, alors que l’accès par le bus ou à vélo conviendrait bien à de nombreux déplacements professionnels. 10 Pratiquer une vraie concertation avec les usagers, en amont des projets La concertation avec les usagers et les associations est souvent perçue par les responsables publics comme une lourdeur et une perte de temps. En fait, c’est l’absence de concertation qui est souvent une source de perte de temps et de récriminations lorsque le projet est trop avancé pour être amélioré. La concertation avec les usagers en amont de tous les projets d’urbanisme, comme le prévoit la loi SRU sur la démocratie de proximité, peut au contraire être un gage d’efficacité, pour peu que les divers groupes d’associations fassent l’effort de définir au préalable un consensus et une expression commune, comme vise à le faire la FCDE. Nous demandons expressément aux responsables politiques, avec leurs adjoints des services techniques, de consulter les associations d’usagers dès le début des projets d’urbanisme, et de leur fournir les plans des projets à leurs différentes phases d’avancement, bien avant l’enquête publique, souvent formelle et trop tardive. 11 Informer et sensibiliser le public pour atteindre les objectifs La valorisation de nouveaux équipements destinés aux circulations douces requiert une phase de promotion et d’information ainsi qu’une signalisation claire et visible.Plus largement, les responsables politiques ont aussi un rôle à jouer, de concert avec nos associations, pour faire évoluer les habitudes locales trop polarisées sur l’usage de la voiture individuelle, et pour inciter à l’usage des modes de « déplacements doux » afin d’atteindre les objectifs du Plan de Déplacements Urbains. Nous demandons que la promotion des équipements auprès des usagers potentiels et la signalisation sur le terrain soit bien prises en compte dans la conception et le financement des projets.